...fellini.huitetdemi.godard.lemépris.polanski.lepianiste.jarmush.deadman.joëlethancoen.fargo.visconti.lesdamnés.josephlosey.theservant.joycemcbougal.carlgustavjung...

Des jours et des nuits sur l'aire un film de Isabelle Ingold

Des jours et des nuits sur l'aire un film de Isabelle Ingold

Des jours et des nuits sur l'aire 

un film de Isabelle Ingold

Isabelle Ingold

 

Quelques mots ont surgi à propos de ce beau film singulier que j'ai eu le plaisir de découvrir sur l'invitation amicale de sa réalisatrice...

Les dire plutôt que les retenir... Une sorte de persistance non seulement rétinienne mais émotionnelle l'imposerait. 
C'est souvent dans l'après-coup que les mots me viennent. Quand insistent la passion qu'a pu soulever en moi certaines images, ou la fascination exercée par ce qui s'affirme, on ne voudrait savoir pourquoi, définitivement comme un art. Celui d'exprimer l'insoupçonnable, ce à quoi nul ne s'attend vraiment.

C'est ainsi que le lendemain ou le surlendemain quelques phrases se sont esquissées autour de ce film qui nous invite à côtoyer des personnes que nous n'avons pas l'habitude de rencontrer.

La douceur, la tendresse, la simplicité, la détermination aussi peut-être avec laquelle Isabelle Ingold nous emmènent dans leur univers personnel au sein de celui collectif et si particulier qu'est une aire, m'ont touchée de façon bien aimable. Et je n'étais pas la seule, je sentais dans la salle tout autour de moi et au-delà, chacun de nous captivé par ce qui nous était donné à voir sur l'écran... 
Particulier oui l'univers des habitants de ce lieu de passage, et pourtant.... ce monde de l'entre deux - entre deux pays, entre deux morceaux de route, entre deux moment de vie- , n'est-il pas aussi le nôtre, celui de toute vie où jamais l'on ne se pose sans imaginer reprendre là route, parce que le mouvement est vital quand bien même parfois on aspire au repos... C'est un peu ce que nous dit Isabelle Ingold à travers la peinture poétique de ces héros du quotidien. On se surprend à les aimer, à aimer être avec eux.

"Tout film de fiction est un peu documentaire", disait Chantal Akerman, et elle poursuivait ..." Je pense que les grands films de fiction ont quelques chose de documentaire. (...) Si vous voyez Au hasard Balthazar il y a aussi quelque chose de documentaire là dedans... " Je dirai à sa suite... si le regard d'Isabelle Ingold est aussi documentaire, il est indéniable qu'il construit une fiction dans laquelle il nous entraine... La vie est à la lisière de ces deux façons de voir et de concevoir, dont la séparation somme toute est artificielle et c'est sur cette troisième voix, - pardon voie -, si délicieusement surprenante, que nous sommes entrainés.

La mise en lumière n'est pas étrangère à ce sentiment... L'éclairage porté sur un lieu et sur des êtres qui ne nous sont pas familiers, car ni notre attention ni notre regard n'ont l'habitude de se poser sur eux, est magnifique. L'attention toute particulière dont ils sont le sujet leur confère à l'égal de la lumière une véritable beauté. 
Aucun discours, juste un regard, mais quel regard... Il nous invite à vivre l'inattendu et nous nous surprenons à le vivre avec une grande simplicité et quelque chose qui serait presque de l'ordre de l'affection pour tous ces personnages humains dont aucun ne nous est (in fine) tout -à- fait étranger! 
Avec une placidité pénétrante qui nous aimante. 
Ce qui est beau dans ce cinéma-là c'est qu'il Il nous emmène dans un ailleurs étrange et familier où le regard donne à voir au-delà ce que nous croyons voir. 
Et soudain se dessine en filigrane ce qui se passe dans un autre espace, où il est question également de séance, d'ombre et d'éclairage, de projection, l'espace analytique... Et je comprends mieux pourquoi j'ai aimé cette mise en lumière qui va au plus près du sensible sans jamais faire acte d'impudeur.... Ce respect qu'aucun inattendu ne saura heurter car il y serait aussi question d'amour.

Une fraîcheur dans cette mise en lumière de ces mondes parallèles qui nous ramènent au centre de nous mêmes une poésie dans le regard. Soutenue par une "mise en scène" qui se laisse oublier à la faveur de ceux que nous sommes invités à côtoyer sur ce chemin de traverse que devient l'aire le temps du film. 
L'effacement induit une sensation de mise en relief... 
Et si l'on parle de l'image, pourquoi se taire sur le son .... ? 
J'ai trouvé - vécu - l'espace sonore particulièrement fascinant tant il participe à la mise en relief. Et à l'attraction que j'ai pu ressentir sans relâche durant la projection. Résultat probable d'un travail subtil, il plane telle une poétique du silence et l'hors champs (in)sonore intrigant relève de la magie. À deux pas de l'autoroute aucun brouhaha mais les bruits infimes de la vie. 
Je n'ai pas vu le film passer c'est à croire que le rythme en est remarquable!
La distance si juste qu'Isabelle Ingold crée entre les protagonistes de son film et nous spectateurs nous attache à eux par le plus simple et le plus insondable à la fois de notre humanité. Il faisait bon durant les 55' passées sur cette aire.


Virginie Megglé

21/07/2017
Retour
Commentaires
Vous devez être connecté pour déposer un commentaire