Chaque visage est le Sinaï d'où procède la voix qui interdit le meurtre - Lévinas

La psychanalyse Dans la presse écrite 2006 la suite

Presse grand public, psychanalyse et internet...




La psychanalyse et des écrits de psychanalyse ou de psychanalystes parus dans la presse et sur internet .... Regards, réflexions, expressions... Réactions ... propositions ... et autres intentions ...
Comment la psychanalyse est-elle perçue dans la presse écrite, par la presse écrite, et comment se laisse-t-elle percevoir à travers la presse... Où se situe-t-elle? Où s'immisce-t-elle?

 

Archives... etc, 2006... c'est-à-dire, dans le même esprit que les années précédentes, et à la suite de archives, etc... 2006, de nombreux articles et autres propos, en relation avec la psychanalyse. Qu'elle soit évoquée comme simple référence ou abordée de façon plus substantielle. Ces articles rendent compte de son actualité et des réflexions qu'elle soulèvent, comme des mouvements qui la traversent, des humeurs qui l'agitent... et des débats qu'elle suscite.
Ils ont retenu notre attention au hasard du fil de nos lectures. Nous les portons à votre connaissance sans aucun dessein d'exaustivité. Ni partialité ni impartialité!
Faire-part ou invitation au partage... S'ils vous étonnent, vous interrogent ou vous surprennent, n'hésitez pas à communiquer à votre tour vos réactions...
L'ordre de présentation, dépendant de celui de nos lectures, ne respecte pas toujours la chronologie ... Les dates de publication mentionnées restent les meilleurs repères.
Il n'est pas impossible qu'un article se retrouve en double...
Sautez-le, passez au suivant, ou ... prenez le temps de le lire une seconde fois .... Pourquoi pas?
A quoi bon nous en tenir rigueur... ?
L'ensemble de ces articles peut permettre, nous semble-t-il, à tout un chacun de se faire une idée de la spécificité de la psychanalyse, de la richesse de son apport.
De sa place et de son rôle aujourd'hui, dans le monde "psy", comme dans un cadre de la vie sociale et culturelle.
De ses limites aussi. Ou de ses risques? Oui.
Et pourquoi pas, des dissensions et autres travers qui animent certains psychanalystes ou certains adversaires de la psychanalyse, détenteurs de Vérité ou partisans de la suprématie absolue et définitive d'une pratique sur une autre!
Autrement dit, cette lecture peut être envisagée comme un reflet de ce que la psychanalyse est susceptible d'apporter... à chacun ... sans pouvoir le garantir.
Et puis... ces articles, à titre d'information préventive, peuvent être abordés comme autant d'éléments d'une protection au moins aussi valable que celle proposée par l'auteur d'un texte de loi qui nous semble, mais pourquoi pas, opportuniste... et non garant véritable de quoi que ce soit...
A chacun de le dire, de le vivre, de le lire, de l'écrire, de le ressentir. À chacun d'aller pour le mieux et pour son bien à la rencontre de l'inconnu en soi.



Les articles qui suivent sont le résultats de nos récoltes entre Juin 2006 et novembre/décembre de la même année. Cela ne veut pas dire qu'ils sont tous parus durant cette période. Bien que cela s'avère la plupart du temps...







Interview : Charles Melman



Les Français sont les champions du monde de la consommation de calmants et d’antidépresseurs, au point que la dépression tend aujourd’hui à devenir une véritable question de société. Pourtant, cette pathologie reste encore mal connue du grand public. Charles Melman, psychiatre et psychanalyste, fondateur de l’Association lacanienne internationale, explique les raisons de son expansion.

Le Magazine.info : Comment distingue-t-on un état dépressif d’un simple état d’âme?

Charles Melman : On distingue très facilement la tristesse passagère d’une véritable dépression. La tristesse est un état moral, un sentiment qui n’a rien de pathologique. C’est une réaction normale de tout individu face à un évènement ou une situation malheureuse. En revanche, la dépression est un état pathologique qui détermine de façon permanente une façon d’être, organise l’ensemble des pensées et contrarie la volonté éventuelle d’un sujet à s’en sortir. Pour le déprimé tout est devenu négatif, lui même se perçoit comme tel. Ses entreprises, il les vit au départ comme inutiles ou inefficaces. Ce qui caractérise une dépression c’est l’impossibilité de s’en sortir par soi-même, et donc le besoin de faire appel à quelqu’un. Si on peut s’en sortir tout seul, c’est alors d’avantage un excès de découragement qu’une dépression.

Le Magazine.info : Observez-vous une augmentation des cas de dépression en France ?

Charles Melman : Cette affirmation est purement factuelle et statistique, mais il est vrai que la clientèle des spécialistes du traitement des maladies mentales et des troubles psychologiques est plus souvent constituée de dépressifs que par le passé. En France, selon certaines statistiques, 15 % des patients qui consultent dans l’ensemble des services des hôpitaux seraient dépressifs.

Le Magazine.info : Comment interprétez-vous cette généralisation des états dépressifs ?

Charles Melman : Je pense qu’elle témoigne de l’avènement d’une nouvelle économie psychique fondée non plus sur le refoulement des désirs mais au contraire sur leur libre satisfaction. La jouissance est devenue une norme sociale, en ce sens qu’elle guide la plupart de nos comportements. Par conséquent, toutes les formes de frustration, jadis acceptées et refoulées, sont aujourd’hui mal vécues par les êtres humains. Cette aspiration à une satisfaction « immédiate » fragilise notre psychisme et génère d’avantage de troubles dépressifs car les limites n’existent plus.

Le Magazine.info : Concernant la jouissance comme norme sociale, pensez-vous que la génération du baby-boom qui a milité dans les années soixante pour une société permissive, a pu favoriser cette mutation ?

Charles Melman : La part de responsabilité de cette génération est réelle et l’affirmation de la pensée libertaire ou de « libération » ne va pas sans poser quelques difficultés. La pensée de Mai 68, en particulier, à laquelle vous faites implicitement référence, a tenu à nous libérer d’un certain nombre de contraintes et de brides imposées aux expressions du désir. D’un certain point de vue, on peut dire que cette pensée a parfaitement réussi puisque nous sommes tous devenus dépendants de cet impératif de jouissance. Mai 68 a donc favorisé l’émergence de nouvelles contraintes. A titre d’exemple, la toxicomanie en tant que phénomène de masse est une conséquence directe de cette période.

Le Magazine.info : Face à cette généralisation des états dépressifs, que peuvent faire les pouvoirs publics ? Peut-on songer à une concertation entre ces derniers et les milieux psychiatriques ou psychanalytiques ?

Charles Melman : Je ne pense pas que les psychiatres et les psychanalystes puissent guérir la situation sociale. Le problème dépasse le gouvernement lui-même. Les hommes politiques ne sont plus maîtres des processus économiques. Ils ne peuvent que se débrouiller et louvoyer avec ces processus. Ils sont exposés à une série d’évènements qui ne peuvent contrôler. Entre la réalité du pouvoir économique et la réalité du pouvoir politique, il n’y a plus de continuité mais des hiatus. Par ailleurs, ce manque de cohérence rend difficile l’exercice politique pour les citoyens de manifester car on ne sait plus très bien contre qui s’opposer.

Le Magazine.info : Sous-entendez-vous que la multiplication des états dépressifs est aussi tributaire de l’économie ?

Charles Melman : Bien sûr ! Aujourd’hui, lorsqu’un jeune doit galérer, quelles que soient ses études, pour trouver un job, un logement, pour pouvoir quitter ses parents et fonder un foyer, pour pouvoir s’offrir une vie décente, croyez-vous que cela soit stimulant ? C’est stimulant un temps, ça l’oblige à se bagarrer mais si il s’il se bagarre pendant des années et que les résultats ne sont pas au rendez-vous, que va-t-il se passer ? Il va se lasser et se dire qu’il ne vaut pas grand chose puisque personne n’a l’air de le reconnaître à sa juste valeur.

Le Magazine.info : Votre ouvrage, L’Homme sans gravité*, dresse un constat alarmant de notre société. Votre vision n’est-elle pas un peu trop pessimiste ?

Charles Melman : Je ne vois pas pour quelle raison nous serions optimistes. D’un point de vue politique et social, la situation me paraît préoccupante. Regardez les millions de jeunes qui ont défilé contre la précarité. Qu’est-ce qui aujourd’hui n’est pas précaire ? Les relations sentimentales, nos situations professionnelles et nos valeurs sont-elles à l’abri ? La seule chose que nous pouvons entreprendre, c’est de faire en sorte que les choses aillent mieux dans le futur.

Propos recueillis par Thomas Vincent , le 3 juin 2006

• Charles Melman, L’Homme sans gravité. Jouir à tout prix. Entretiens avec Jean-Pierre Lebrun. Denoël (2002), Folio Essais (2005).

©2005 LEMAGAZINE.INFO.







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Libération

du 4 mai 2006


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La psychanalyse est-elle dépassée ?





Aujourd’hui remise en question par les progrès de la connaissance du cerveau, la psychanalyse défend une vision du psychisme de l’Homme qui ne saurait se réduire au simple fonctionnement de ses neurones. Exigeante méthode d’exploration de soi, aux résultats cliniques incontestables, la psychanalyse apparaît comme un humanisme salutaire contre les aliénations d’une société moderne qui privilégie les performances techniques et le règlement chimique des souffrances de l’âme.

Inventée par Sigmund Freud en 1896, la psychanalyse est une discipline qui comprend une méthode thérapeutique, un système de pensée et un mouvement politique lui permettant de transmettre son savoir et de former des praticiens.
Fondée sur l’exploration de l’inconscient, elle ne doit être confondue ni avec la psychiatrie, branche de la médecine qui traite des maladies mentales, ni avec les diverses écoles de psychothérapie qui mettent en jeu d’autres formes de traitement des états psychiques, ni avec la psychologie qui étudie l’ensemble des discours relatifs aux relations entre l’âme et le corps. Bien qu’elle soit différente de toutes ces disciplines, la psychanalyse n’a cessé de les nourrir et de les transformer tout au long d’une histoire conflictuelle.
Née à Vienne, au cœur de l’empire austro-hongrois, et portée par des Juifs des Lumières, la psychanalyse s’est implantée dans une quarantaine de pays et en majorité, exception faite du Japon, dans l’aire dite de la « civilisation occidentale ». Deux conditions préexistent à la formation de son mouvement : d’une part la constitution d’un savoir psychiatrique, c’est-à-dire d’un regard sur la folie capable de conceptualiser la notion de maladie mentale au détriment de l’idée de possession démoniaque, et de l’autre l’existence d’un Etat de droit susceptible de garantir la liberté d’association et de réduire toute emprise sur les consciences.
Une certaine conception de la liberté humaine

Les conditions d’existence de la psychanalyse semblent répondre à une conception de la liberté humaine qui est en contradiction avec la théorie freudienne de l’inconscient. Celle-ci montre en effet que l’Homme n’est pas le maître en sa demeure, tant sa liberté est soumise à des déterminations qui lui échappent. Or, pour qu’un sujet puisse faire l’expérience de cette « blessure narcissique » par quoi il n’est pas libre, encore faut-il qu’existe dans la société où il parle une reconnaissance consciente de l’inconscient. De même que l’exercice de la liberté de la psychanalyse a partie liée avec la constitution de la notion de sujet dans l’histoire de la philosophie occidentale.
Après cent ans d’existence et de résultats cliniques incontestables, la psychanalyse est aujourd’hui violemment critiquée, là où elle s’est le mieux implantée, par les adeptes de l’homme-machine, qui font dériver du cerveau tous les problèmes psychiques en prétendant les éradiquer par des traitements chimiques jugés plus efficaces parce qu’ils atteindraient les causes dites « cérébrales » des déchirements de l’âme.
Dès les premières publications de Freud, la psychanalyse fut regardée comme un « pansexualisme » portant atteinte à la dignité des familles et réduisant les passions humaines à des « choses génitales ». On pensait volontiers qu’elle pouvait entraîner la société vers la décomposition. En bref, on projetait sur la psychanalyse les peurs et les angoisses d’une époque caractérisée par la libération des mœurs, l’émancipation des femmes et le déclin de l’autorité patriarcale.
Le règne de l’homme-machine

Aujourd’hui, nous vivons dans un monde où chacun recherche un confort individuel. Mieux vaut ne rien savoir de son être intime plutôt que d’être hanté par les fantômes de la mémoire. Le modèle dominant de l’économie libérale restreint les libertés subjectives en ayant l’air de les élargir. Il transforme le sujet en une individualité biologique à laquelle il réclame performance et productivité. En contrepartie, il abolit toute réflexion sur soi. L’homme moderne de l’économie libérale doit être lisse et sans conflits. Semblable à un ordinateur, il ne doit pas offrir le spectacle d’une quelconque défaillance.
Mais ne pouvant obéir à une telle injonction, il a le choix entre devenir dépressif à force de refouler son angoisse et devenir victime à force de rechercher les causes de son malheur dans l’agressivité venue de l’extérieur.
Dans un cas, il ressemble à un animal domestiqué, persuadé que son malaise viendrait d’une « maladie » surgie de ses gènes, de ses neurones, et dans l’autre cas, il se place sous l’emprise imaginaire d’une influence : influence des esprits, des astres, ou encore des complots, des riches, des méchants, des corrompus, etc. Aussi accuse-t-il les autres (ou l’Autre en général) d’être à l’origine de ses souffrances. Il se tourne alors vers de multiples psychothérapies destinées à réparer son moi narcissiquement blessé et jugées plus efficaces que la psychanalyse dans la mesure où elles évitent l’exploration de l’inconscient.
On comprend donc pourquoi l’attaque contre la psychanalyse n’est plus la même qu’autrefois. Le divorce n’est plus un scandale aujourd’hui et chacun réclame sa part de liberté sexuelle sans incriminer Freud d’être responsable d’un relâchement des mœurs. Et du coup, sa doctrine fait figure de vieille dame conservatrice et inutile.
La défense du sujet

Loin de contester l’utilité des substances chimiques et de négliger le confort qu’elles apportent, il est nécessaire pourtant de réaffirmer qu’elles ne sauraient guérir l’homme de son malaise psychique. La mort, les passions, la sexualité, la folie, l’inconscient, la relation à autrui façonnent la subjectivité de chacun et aucune science digne de ce nom n’en viendra jamais à bout. Par ailleurs, même si existent partout des maltraitances, même si la misère et le chômage sont des fléaux inadmissibles, même si l’exploitation, les abus et les inégalités persistent et doivent être combattues par des lois, aucun sujet ne doit être regardé en soi comme une victime.
Autrement dit, pour qu’un humain puisse devenir un sujet digne de ce nom, encore faut-il qu’il ne soit pas assimilé à un ordinateur sans pensée, ni affect, ou à un animal physico-chimique réduit à des comportements.
L’hostilité actuelle envers la doctrine freudienne est le signe à la fois de son succès et de la perte dans les sociétés occidentales d’une certaine conception de la liberté humaine. L’épanouissement d’une multiplicité de méthodes thérapeutiques, qui tendent à uniformiser le traitement du psychisme sous l’étiquette d’une nomination de pacotille (le « psy »), est l’indice de cette perte et de l’abaissement de la notion de sujet au profit de celle d’individualité.
Si le XIXe siècle fut le siècle de la psychiatrie et de l’asile et si le XXe siècle fut celui de la psychanalyse et du remplacement de l’asile par les substances chimiques, le prochain siècle sera celui des psychothérapies de toute nature - des plus sérieuses aux plus dangereuses (comme les sectes par exemple) -, qui prendront massivement en charge les malheurs du psychisme laissés pour compte par l’échec des substances chimiques au sein d’une société de plus en plus aliénante et dépressive.
Pour renouveler son originalité et affirmer son identité, hors des dogmes d’écoles et des jargons, la psychanalyse devra donc réaffirmer ses valeurs essentielles et universelles. Si elle veut rester une avancée de la civilisation sur la barbarie - c’est-à-dire un véritable humanisme -, il lui faudra restaurer l’idée que l’Homme est libre de sa parole et que son destin ne se limite pas à son être biologique. Ainsi pourra-t-elle à l’avenir tenir sa place, à côté des autres sciences, pour lutter contre les prétentions obscurantistes visant à réduire la pensée à un neurone ou à confondre le désir avec une sécrétion chimique.

Elisabeth Roudinesco
Historienne, directrice de recherche
à l’université de Paris VII

Elisabeth Roudinesco a également été membre de l’Ecole freudienne de Paris (1969-1981)?



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Libération




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Danièle Flaumenbaum, gynécologue
S'ouvrir au plaisir sexuel





Plus de trente ans après Mai 1968 et la libéralisation de l'avortement, les femmes, dans leur majorité, continuent de vivre difficilement leur sexualité. Pourquoi le plaisir, voire le désir, sont-ils si peu souvent au rendez-vous de la rencontre amoureuse ? Qu'elles aient 20, 30, 40 ou 60 ans, comment les femmes construisent-elles cette part essentielle de leur intimité ? Gynécologue et acupunctrice, Danièle Flaumenbaum propose, dans Femme désirée, femme désirante (Ed. Payot, 234 p., 17 euros), des réponses singulières et troublantes. Au croisement de la psychanalyse et de la médecine chinoise, elle affirme le rôle central que les mères ont à jouer pour apprendre à leurs filles à vivre pleinement leur sexualité.


"95 fois sur 100, la femme s'emmerde en baisant", chantait Brassens dans les années 1960. Aujourd'hui, bien que l'épanouissement sexuel fasse partie des moeurs, voire de la norme, ce chiffre, écrivez-vous, resterait supérieur à... 80 % ?

Il s'agit de ma statistique propre, établie sur la base de ma clientèle, en Occident, en France, à Paris... Mais j'exerce depuis trente ans, et je le confirme : tout au long de ma pratique, la majorité des femmes qui m'ont consultée souffraient de ne pas vivre leur sexualité comme elles le souhaitaient. Le droit au plaisir est socialement acquis, l'évidence que la sexualité fait partie de leur vie aussi, mais, de la théorie à la pratique, cela ne suit pas. Les femmes ne sont toujours pas préparées à savoir vivre leur sexualité. L'évolution positive, c'est qu'elles venaient autrefois me consulter avec des symptômes, et qu'elles viennent désormais, de plus en plus, avec des questions.


Depuis trente ans, les travaux de la neurophysiologie ne cessent de démontrer que le clitoris est la principale zone érogène de la femme. Or, selon vous, le lieu central de la jouissance féminine serait... l'utérus ?
La jouissance clitoridienne est une chose, celle que procure l'utérus en est une autre. Si la pensée occidentale insiste peu sur le rôle de l'utérus dans le plaisir féminin, la médecine taoïste, en revanche, lui accorde une grande importance. Les Chinois de la Chine ancienne, pour qui la sexualité est nécessaire à l'entretien de la vie, à l'épanouissement de l'esprit et à la prévention des maladies, ont décrit les trajets de l'énergie sexuelle. Selon la sexualité taoïste, l'utérus est le "chaudron alchimique", la caisse de résonance dans laquelle se rencontrent et s'unissent les forces masculines et féminines. Mais il faut pour cela que le corps de la femme accepte véritablement de s'ouvrir, ce qui est rarement le cas. Chez la plupart d'entre elles, les énergies se bloquent au fond du vagin, parfois même en y provoquant de vives douleurs.


S'ouvrir à l'homme qu'on aime : pourquoi est-ce si difficile ?
Parce que nos mères ne nous l'ont pas appris ! Les petites filles ne peuvent rêver de devenir "maman" que si leur mère est heureuse de l'être. De la même façon, elles doivent pouvoir grandir en sachant que la sexualité qu'elles vivront quand elles seront grandes leur donnera du plaisir et des forces. Ce qui est loin d'être toujours le cas.

Grâce à ma mère, j'ai été promise à devenir une mère heureuse pouvant exercer un métier indépendant, mais pas à devenir une femme sexuée. Le sexe, sa magie, sa force, n'avaient pas d'existence dans ma famille : cela ne faisait pas partie de ce qu'on avait à me transmettre. Or, aujourd'hui encore, la plupart des mères perpétuent ce schéma. Elles ont le souci d'aider leurs filles à devenir des femmes pensantes et autonomes, mais elles n'ont pas intégré le rôle qu'elles avaient à jouer pour les aider à devenir des femmes sexuées. N'ayant pas reçu elles-mêmes cet héritage, le plaisir érotique n'a aucune place dans leur discours. On est ainsi passé de l'interdit au déni de la difficulté.

Et, pour dépasser cette difficulté, que devraient-elles faire ?
L'idéal, c'est d'avoir des parents qui vivent pleinement leur sexualité, de grandir en sentant que cela fait partie de la vie. Je le vérifie tous les jours : des femmes qui ont eu une mère, voire une grand-mère, pour qui il était normal de vivre sa sexualité n'ont pas de problèmes sur ce plan. Le simple fait de grandir dans le même espace qu'une mère qui a du plaisir à faire l'amour et à être mère suffit à assurer la transmission. Et quand ce n'est pas le cas, une mère doit savoir se dire à elle-même, et dire à sa fille, qu'elle lui souhaite de vivre sa sexualité avec plus de bonheur qu'elle n'en a eu elle-même. Dès l'enfance, une mère doit instruire sa fille du fait que plus tard elle aura du plaisir à accueillir l'homme qu'elle aime dans son sexe.


Et le rôle des hommes, dans tout ça ?

Même s'il existe des initiateurs, même si l'homme aimé - et aimant - peut aider sa partenaire à s'ouvrir à lui, ce n'est pas à lui de construire la femme. Ce n'est pas à lui de la "porter", car elle risque alors de l'aimer comme elle aimerait une mère, et cet amour-là n'est pas sexué. De plus, les hommes ont leurs propres difficultés : eux aussi, souvent, sont restés coincés dans les modèles de leur père ou de leur grand-père, dans une sexualité clivée entre "la maman et la putain" qui ne facilite pas toujours leur épanouissement. Cela ne veut pas dire qu'en tant que pères ils n'ont aucun rôle à jouer dans la construction sexuelle de leurs filles : pour pleinement savoir qu'on est une femme, il faut aussi le découvrir dans le regard d'un homme, et en premier lieu dans celui d'un père.

Dans le plaisir sexuel, quelle importance accordez-vous à l'orgasme ?
L'orgasme, c'est une acmé, issue de la résonance des forces sexuelles mises en jeu. Même s'il est espéré, l'idée n'est surtout pas de le rechercher à tout prix - d'autant moins que cette "obligation de résultats", chez la femme, suffit souvent à l'empêcher. L'important, c'est de rechercher l'accord qui, éventuellement, permettra qu'il advienne. Dans la rencontre amoureuse et charnelle, ce n'est pas l'orgasme qui préside à une sexualité enrichissante et satisfaisante, c'est le désir. Et le plaisir, c'est la réalisation du désir.


Propos recueillis par Catherine Vincent



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Le Monde

du 15 mai 2006


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Vous
Santé. Feu vert de l'Agence européenne du médicament.?Le Prozac autorisé dès l'âge de 8 ans



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Par Sandrine CABUT?samedi 10 juin 2006
?Peut-on donner des antidépresseurs aux enfants ? Jusqu'ici, seuls les Américains avaient franchi le pas, en autorisant le Prozac (fluoxétine). Les autorités sanitaires européennes y étaient réticentes, en raison d'un risque suicidaire, notamment chez les adolescents. Le débat est désormais tranché, du moins réglementairement. L'Agence européenne du médicament, qui, il y a encore un an, déconseillait les antidépresseurs en dessous de 18 ans, vient de se déclarer favorable à l'utilisation du Prozac dès l'âge de 8 ans, dans certaines conditions. A la lumière de nouvelles études fournies par Lilly, fabriquant de la célèbre pilule, l'Agence européenne juge aujourd'hui les bénéfices potentiels supérieurs aux risques. Le Prozac pourra être prescrit à des enfants pour un épisode dépressif majeur, quand 4 à 6 séances de psychothérapie n'ont pas donné de résultat suffisant. L'Agence européenne a cependant demandé à Lilly de mener de nouveaux travaux sur la sécurité de son antidépresseur, les conséquences sur la croissance, notamment, étant méconnues.
Particulièrement prudente sur ce dossier, l'Agence française de sécurité sanitaire des produits de santé (Afssaps) rappelle que la psychothérapie reste le premier traitement recommandé pour les dépressions infantiles. Il y a plusieurs mois, l'Afssaps a, par ailleurs, commandé une enquête nationale, pour connaître les conditions d'utilisation des antidépresseurs chez les enfants et ados. Ses résultats sont attendus prochainement.
De fait, prescription déconseillée ne veut pas dire prescription interdite. Et les pédopsychiatres n'ont jamais nié avoir recours à des antidépresseurs pour leurs petits malades, dans des cas difficiles. «C'est une aide pour un tiers de nos patients, estime Xavier Pommereau, qui prend en charge des ados. En les prescrivant sous bonne surveillance, nous n'avons jamais eu d'ennuis, mais je pense que cela relève du spécialiste.» Ce psychiatre bordelais se dit néanmoins «rassuré» par l'aval européen, car «il est toujours compliqué, même à l'hôpital, de prescrire des médicaments non recommandés». Reste à savoir si ce feu vert ne va pas entraîner un pic de prescription en médecine de ville.




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Libération

du 11 juin 2006


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Jacques Lacan entre dans le marché de l'art


(Voir d'autres articles sur le même sujet, plus bas)

Pour la première fois, des oeuvres graphiques et des manuscrits du psychanalyste Jacques Lacan (1901-1981) seront mis en vente, vendredi 30 juin, à Paris, chez Artcurial. Exposées depuis le 23 juin à l'hôtel Dassault, les quelque 130 pièces sont visibles sur www.artcurial.com.

La famille Lacan s'est opposée à la vente. La maison Artcurial signale que la fille du psychanalyste, Judith Miller, a refusé d'autoriser la reproduction de photos de son père publiées dans son Album Jacques Lacan, visages de mon père (Seuil, 1991). Mme Miller n'a pas souhaité répondre à nos questions.
L'évaluation de la collection Vappereau n'a pas été une mince affaire. Quelle valeur accorder aux dessins ? Certains sont estimés 10 000-12 000 euros, la moyenne se situant aux alentours de 4 000 euros. Olivier Devers, consultant pour la vente, a eu moins de mal à estimer les manuscrits, qui constituent, selon lui, "un complément indispensable aux oeuvres graphiques". Le tout est estimé à 450 000 euros.
Admirateurs ou pourfendeurs de Lacan, tous attendent l'événement. "On est au bord de la rupture de stock du catalogue d'exposition, édité à 3 500 exemplaires", constate Olivier Devers. Et pour cause, ajoute-t-il : "Les psys savent qu'ils ne reverront pas de sitôt ces dessins. La famille Lacan édite son oeuvre au compte-gouttes."
Dans les années 1970, Jacques Lacan s'était entouré d'une bande de jeunes mathématiciens avec lesquels il s'échinait à résoudre des énigmes via le calcul et le dessin. De cette émulation, pour ne pas dire véritable obsession, sont nés une série de graphes jetés le plus souvent sur des feuilles A4 : chaînes, tresses, ronds, noeuds borroméens (enlacement de trèfles) dessinés à l'encre ou au crayon feutre.
"Le noeud borroméen était devenu pour Jacques Lacan à la fois un symbole, un instrument de recherche et une éternelle interrogation", résume Roland Dumas, qui fut l'avocat de Lacan, dans l'avant-propos du catalogue. Œuvres d'art contemporain ou brouillons de la pensée du psychanalyste, chacun y trouvera ce qu'il veut. "C'est un "work in progress", au sens de Joyce", estime Olivier Devers.
"Ce morceau d'archives correspond aux années décisives de l'aventure topologique, aux énigmes des noeuds, aux entrelacements du triple RSI (Réel, Imaginaire, Symbolique)", écrit dans l'introduction du catalogue Jacques Roubaud, mathématicien et poète, membre de l'Oulipo (Ouvroir de littérature potentielle) et auteur de Ma vie avec le docteur Lacan.
Parmi les manuscrits on trouve des lettres, des textes humoristiques ("Je n'ai dit que des sottises..."), des réflexions lacaniennes ("Dire ce qu'on pense. C'est court"), des calculs autour du triangle de Pascal et, aussi, ce document intitulé "Questions des passeurs" où Lacan liste des noms d'analystes - parmi lesquels Elisabeth Roudinesco.
Cette collection appartient à Jean-Michel Vappereau, l'un des mathématiciens qui gravitaient autour de Lacan. Il est par ailleurs psychanalyste, et Mme Roudinesco souligne son rôle dans sa biographie de Jacques Lacan (Esquisse d'une vie, histoire d'un système de pensée, Fayard, 1993).
M. Vappereau a décidé de vendre ces dessins pour acheter un appartement, à Paris, où seront entreposées des archives de psychanalyse. "Roland Dumas voulait que je donne les oeuvres de Lacan à la Bibliothèque nationale de France, mais je préfère qu'elles circulent dans le public", explique-t-il sans états d'âme.



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Me Monde

du 25 juin 2006


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Ci-dessous, un article du Monde qui ne cite pas la psychanalyse ni même la psychothérapie, mais qui, d'associations d'idées en associations d'idées, la sous-entend ... À notre avis, cependant, le phénomène pointé n'est pas un phénomène internet, et ce serait déplacer si ce n'est éluder le sujet que de l'aborder en ces termes. Les produits ici dénoncés en même temps que le mode de vie de ceux qui y ont recours est monnaie courante chez nombre de "stars" médiatiques (je ne dis pas artistiques) depuis des années. Dans mon enfance déjà j'étais étonnée de voir les adultes prendre comprimés sur comprimés par plusieurs et plusieurs fois dans la journée... Pour survivre... Il est vrai que leur succès dans le domaine de chacun (parentale ou professionnel) en dépendait ou en dépend... Je n'ai envie de citer personne aujourd'hui, car il ne s'agit pas de dénoncer "une personne" mais de ne pas se tromper sur la façon d'aborder le sujet. Cependant, à titre d'exemple célèbre, pour qui a envie de se lancer dans un jeu de piste, le livre touchant d'une jeune femme, fille d'un homme hyper-médiatisé depuis des années, révélait il y a un an ou deux la pratique du père....
À quoi tient cette volonté de succès ou ce désir de reconnaissance à n'importe quel prix? À quoi tient ce désir du paraître au détriment de l'être/ ceci est bien une question psychanalytique!






Métro, boulot, dopage



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L'essor d'Internet va-t-il "démocratiser" l'accès aux produits psychoactifs, hallucinogènes, stimulants ?


Bien sûr. Internet va accentuer la diffusion mondiale de ces produits. Déjà, hormis la cocaïne et l'héroïne, vous pouvez quasiment tout vous faire livrer en France en quarante-huit heures grâce à Internet : médicaments licites, illicites, champignons hallucinogènes, graines de toute nature...



Drogues à la carte, de Michel Hautefeuille ( Payot, 2002).

Drogues et dépendances, données essentielles, OFDT (La Découverte, 2005).

Comment voyez-vous évoluer l'utilisation de ces molécules ?

Je pense que leur utilisation va être exponentielle. C'est pourquoi j'évoque dans mon livre l'idée de l'"Homo syntheticus", une caricature des tendances actuelles : quelqu'un pharmacologiquement programmé, et pour lequel, à chaque moment de la journée, existerait un produit adapté. Certaines personnes fonctionnent déjà comme cela. Elles se réveillent, prennent leur cocktail vitaminé ou leurs anabolisants, puis des excitants de plus longue durée, enfin, en rentrant le soir, quelque chose pour se décontracter, puis pour dormir... Le lendemain, elles redémarrent. Cette tendance a pris ancrage il y a quelques décennies, et il n'y a aucune raison qu'elle s'arrête.


Ne s'agit-il pas d'usages marginaux ?


Le nombre de ces personnes, certes limité, est difficile à évaluer, car il relève du chiffre noir implicite aux pratiques clandestines. Mais on constate une tendance lourde, notamment dans le monde du travail. En consultation à Marmottan, on voit de plus en plus de salariés sous antidépresseurs et anxiolytiques, qui ont forcé les doses prescrites, avant pour certains d'utiliser des amphétamines. On entre dans ce que j'appelle le "dopage au quotidien" : comme les sportifs, ces salariés prennent des produits pour rester dans la compétition. Un salarié gorgé de caféine haut dosage ou d'excitant est performant, il assure. Tout le monde sait qu'un certain nombre d'entre eux se chargent, mais tant que cela fonctionne, le milieu professionnel ferme les yeux.


Comment expliquer cette évolution ?

Depuis les années 1980, le médicament a perdu son statut un peu magique et sa référence directe à une maladie et à un traitement. Ce changement est incarné par le Prozac, un antidépresseur devenu quasiment à la mode. On sait aujourd'hui que le nombre d'utilisateurs de ces produits est bien supérieur aux personnes cliniquement déprimées. Ce changement arrange bien les laboratoires car de nouvelles formes de dépendance s'installent.

Cette évolution repose sur une triple logique : le premier axiome, c'est qu'à tout tracas du quotidien correspond une réponse pharmacologique. Le second, c'est que tout écart par rapport à la norme est considéré comme pathologique parce que socialement inacceptable. Il est devenu insupportable de côtoyer des personnes déprimées, colériques ou même en deuil. Enfin, nous baignons dans une obligation de performance qui est une exigence totale. Il faut être performant au boulot, dans sa vie sociale, affective, sexuelle. Nous avons même une obligation de bonheur avec une confusion entre le bonheur et les outils pour y accéder, ce qui explique pour partie la frénésie de consommation actuelle.


Quelles vont être les prochaines molécules consommées ?

De nombreux laboratoires travaillent sur des produits de confort : des molécules que pourrait prendre quelqu'un en bonne santé, juste pour améliorer son vécu quotidien. Les prochains produits vont concerner le maintien de la forme, la conservation de l'énergie, l'antivieillissement... en relation avec l'exigence de performance.

Les pharmacologues devraient ensuite réussir à mettre sur le marché des molécules efficaces sans entraîner d'effets secondaires, notamment en termes de dépendance. Un exemple type est le Modafinil. Prescrit en France contre la narcolepsie, il permet de rester vigilant pendant quarante-huit heures d'affilée, sans effets secondaires et ni dépendance. Cette molécule qui peut être achetée facilement sur Internet, est un produit rêvé pour nombre d'activités sociales. Vu ses potentialités, pourrait-on imaginer, à l'avenir, une compagnie d'assurances reprochant à un conducteur s'étant endormi sur l'autoroute de ne pas avoir pris de Modafinil ?


Peut-on imaginer des usages nouveaux ?

Le domaine des drogues récréatives est en voie d'exploration. Certains produits, comme les hallucinogènes de courte durée, existent déjà. Des chimistes travaillent actuellement sur des produits qui créeraient des illusions ou des modifications de la perception sans les deux défauts des produits existants : des durées d'action longues comme le LSD, et des effets secondaires, comme des retours hallucinatoires. Une molécule assez ancienne, le DMT (diméthyltryptamine), appelé aussi hallucinogène de la pause-déjeuner ou du businessman, donne des hallucinations à la demande, sur trois quarts d'heure, une heure. On pourrait imaginer prendre ce type de produit plutôt que d'aller au cinéma entre midi et deux.
Comment la société va-t-elle accepter cette évolution ?

Bonne ou mauvaise, cette tendance me semble inéluctable. La question est de savoir quand et comment la société va en prendre acte. Nous sommes dans une période intermédiaire où l'idée de médicament de confort fait son chemin, ainsi que celle de l'aide pharmacologique au quotidien. Mais je dirais que jusqu'ici la prise de produits reste utilitaire, donc moralement justifiable, donc acceptable.

Le produit le plus addictogène au monde est le tabac, et celui qui fait le plus de dégâts, l'alcool. Le caractère illicite des produits est très arbitraire et n'a rien à voir avec la dangerosité réelle. Par contre, il semble que ce qui rend un produit illicite, c'est-à-dire socialement inaccepté, soit proportionnel à sa capacité à produire du plaisir. Nous sommes encore très loin de la possibilité de libre usage de produits qui ne créeraient que du plaisir. Même si toute une partie de la société de consommation paraît en faire l'apologie.

propos recueillis par Laure Belot et Cécile Prieur










CHIFFRES

8,7 MILLIONS DE PERSONNES, SOIT 1 FRANÇAIS SUR 5 ENTRE 12 ET 75 ANS

, ont consommé un médicament psychotrope (anxiolytique, somnifère, ou

antidépresseur) en 2005. (Inpes, OFDT)


2 % DES FRANÇAIS DE 18 À 64 ANS ONT EXPÉRIMENTÉ L'ECSTASY EN 2005

, et 1,5 % les amphétamines. En dix ans,

cette proportion a plus que doublé

chez les 18-44 ans.

SUR INTERNET

Observatoires français et européens des drogues et des toxicomanies.

WWW.OFDT.FR


WWW.EMCDDA.ORG






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Le Monde

du 25 Juin 2006


Subjectivités 2005



Subjectivités 2004



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?* Dans le Figaro de ce jeudi 29 juin 2006, ceci:

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"Le Figaro
À vendre, l'inconscient de Lacan

Marché de l'art Un ensemble inédit de documents d'archives du maître-penseur de la psychanalyse est mis aux enchères vendredi chez Artcurial.

SILENCE d'église dans le bureau design où sont accrochées sur le mur des reliques proches du mystère divin, ces documents d'archives de Jacques Lacan sortis du coffre-fort d'un fervent disciple le temps d'une vente aux enchères au contenu assez surréaliste (produit estimé autour de 450 000 €). Des feuilles d'abord plutôt modeste, sorte de copie d'universitaire où court une écriture ferme, assez virile, avec des ratures mais guère d'hésitations. Comme une pensée fluide et pourtant diablement absconse d'un drôle de sorcier de la parole avec sourcils broussailleux et noeud papillon (1901-1981). Des dessins emmêlés comme les souvenirs, les sensations et les idées, «noeuds borroméens de trois tétraèdres», tresses mathématiques, trèfles enchaînés comme des énigmes, calculs ésotériques à la Da Vinci Code, brouillons au bic, au feutre, à l'encre, tout ce qu'un trait peut exprimer d'un «penseur du monde flottant».

Attention, fan-club. En quelques semaines, les lacaniens et autres nostalgiques d'une époque chercheuse et libertaire se sont déjà disputé les 3 500 catalogues d'Artcurial (15 € ce petit «collector», riche de textes inédits mais sans les Visages de mon père réservés par Judith Miller à son Album Jacques Lacan en 1991). Les enchères diront demain à partir de 14 h 15 jusqu'où ira leur fascination, particulièrement palpable en salle de consultation à l'Hôtel Dassault (lots estimés de 2 000 € à 12 000 €, pour le plus rare ou le plus significatif). Il y a de la ferveur chez ces lecteurs, comme sous la plume du mathématicien et poète Jacques Roubaud qui a écrit la préface de ces «Brouillons «Là-Quand» par amour de son «Docteur Lacan, coyote». Difficile de chiffrer le poids symbolique d'un ensemble qui échappe à la classification habituelle des manuscrits et qui raconte pourtant assez bien l'esprit d'un homme, génie pour les uns, imposteur pour les autres, sujet inépuisable de glose et de commentaires (1,88 million de réponses sur le Net !).

«Sans être favorable à cette dispersion, la famille de Lacan ne s'y est pas opposée formellement», soulignait hier l'expert de la vente, Olivier Devers, d'une prudence de Sioux dans ce domaine psy traditionnellement riche en querelles et contestations... Lacan ne traita-t-il pas son ennemie Marie Bonaparte, «princesse chérie» de Sigmund Freud, de «cadavre ionescien» ? Paradoxe donc que ces écrits précieux qui témoignent d'un praticien qui fonda «l'émergence de la vérité aux détours du surgissement de la parole». Lire ou écouter, écrire ou parler, il ne faut plus choisir, 25 ans après sa mort. «Je n'ai dit que des sottises / inédit kdessot'tise / ddesse ottise / jeûn'ez dit...», voilà un échantillon lacanien, estimé 4 000-5 000 €, qui renvoie à l'humour de Queneau et sa «pentosyllabe monophasée» jetant Zazie dans le métro.

Légendaires jeux de mots

L'essentiel de l'enseignement de ce Freudien, provocant comme ses légendaires jeux de mots, controversé comme la durée variable de ses séances, polémique comme son rapport à l'argent, est resté oral. La retranscription de ses fameux séminaires (de 1950 à 1980), confiée à son gendre et exécuteur testamentaire, Jacques-Alain Miller, n'est pas achevée (12 publiés sur 26), au grand dam de certains rigoristes. L'Associa tion des amis de Jacques Lacan s'est inquiétée ainsi auprès de Francis Briest, marteau de cette ultime séance, «du statut de ces oeuvres par rapport au droit moral et au droit de divulgation», aujourd'hui éminemment restreint, comme des garanties d'authenticité des «dessins proposés, non signés et non répertoriés» de Lacan. Leur valeur, réelle et marchande, est en jeu.

«Quiconque veut représenter quelque chose d'irréel doit se conformer à certaines règles. Ces règles sont, à peu de chose près, celles que doit respecter tout narrateur de contes de fées : créer le contraste, provoquer l'étonnement. (...) Seuls ceux qui sont prêts à aller au-delà des apparences peuvent jouer et comprendre un tel jeu – ceux qui acceptent de se servir de leur intelligence, comme ils le font pour résoudre une énigme. Ce n'est donc pas affaire de sens, mais de cerveau. Nul besoin d'être profond, il suffit d'avoir le sens de l'humour et de savoir se moquer de soi, du moins dans le cas de celui qui fait les représentations», souligna le graveur hollandais Maurits Cornelis Escher (1878-1972) dans sa biographie. Les mathématiciens et les hippies californiens ont popularisé dans les années 60 cet inventeur de dessins qui défient l'impossible, la gravité et les lois optiques, grand habitué des antichambres psys devant l'Eternel."



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Le Figaro

Juin 2006


Subjectivités 2005



Subjectivités 2004



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Culture
Enchères. Une centaine de croquis et griffonnages du psychanalyste étaient vendus vendredi à Paris.?Les brouillons de Lacan dispersés sans conscience
Par Edouard LAUNET?samedi 01 juillet 2006




Séance de grand n'importe quoi vendredi après-midi chez Artcurial, sur les Champs-Elysées, où était dispersée aux enchères une grosse centaine de feuilles de papier griffonnées par le psychanalyste Jacques Lacan. Lacan à l'encan : c'était une première et sans doute pas une dernière, vu qu'à peu près tout est parti. Mais ce fut bien laborieux.
Furent écoulés, pour quelques milliers d'euros la feuille, divers types de griffonnage. D'abord des croquis abscons, fruits de la passion pour les maths qui avait saisi le maître sur le tard. Lacan voulait rendre compte du fonctionnement de l'inconscient via des concepts topologiques ! Le résultat, à base de «noeuds borroméens» et de «pavage-nouage de tétraèdres par les faces», vaut surtout par ses vertus comiques. Le catalogue de la vente était introduit ­ une autre première probablement ­ par six pages d'obscures considérations mathématiques dues à la plume de Jean-Michel Vappereau, l'homme à qui Lacan s'était encordé pour ces périlleuses ascensions topologiques.
«Graffitis». C'est Roland Dumas qui avait présenté Vappereau à Lacan. L'ancien garde des Sceaux a confié qu'à l'époque «le bureau de son cabinet était jonché de balles de golf sur lesquelles il traçait des lignes de trois couleurs qui s'entrecroisaient, se chevauchaient, se recoupaient». Les balles n'étaient pas en vente hier.
Les enchères se sont déroulées sous l'oeil navré d'anciens élèves du maître et d'une cinquantaine de personnes au total. «Tout cela est pathétique, estimait Nathanaël Majster, secrétaire général de l'Association des amis de Jacques Lacan. Cette vente donne de Lacan une image de génie fou ou de Dr Mabuse. Ce type de travaux avait suscité à l'époque l'hostilité et la méfiance de l'ensemble des élèves.» Guère plus de tendresse à l'Association lacanienne internationale, où l'on parle de «graffitis et de brouillons qui relèvent du fond de poubelle». Pas un seul de ces mystérieux crobards n'a atteint son prix d'estimation.
«C'est une vente énigmatique et douloureuse, ajoutait Nathanaël Majster. Des dessins non signés et non répertoriés, voilà qui ouvre une brèche à la confection de faux Lacan. C'est dommageable pour l'oeuvre entière.» En préambule de la vente, le commissaire-priseur Francis Briest s'était senti tenu de rappeler que l'authenticité des pièces était garantie dix ans par la maison. «On se demande ce que la famille pense de tout cela» conclut le secrétaire général des Amis. Question transmise à Jacques-Alain Miller, gendre et exécuteur testamentaire, qui a déclaré à Libération : «Rien à déc

21/12/2007
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