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Une faute

De l’erreur à la faute et de la faute au crime


À propos d’une faute

 

« La pensée progresse à coups d'erreurs corrigées; la science procède de même ; il n'y a pas de vérités premières, mais seulement des erreurs premières»

Bachelard

 

Je n’ai pas fait ce qu’il fallait… Il ne fait pas ce qu’il faut… La faute réside dans l’accomplissement d’un acte qu’il ne fallait pas faire selon des règles ou des codes établis, sensés être connus de celui qui, ne s’y conformant pas, peut être pris en défaut. « Nul n’est sensé ignorer la loi ». Est reconnu coupable de transgression qui ne se sous-met à celle-ci, et donc fautif et répréhensible…

 

À la faute est liée la notion de manquement à une obligation. Nous sommes liées à la communauté par le devoir et  l’obligation. 

 

La faute est relative au devoir moral, c’est-à-dire à celui qui relève des mœurs supposées bonnes d’une société. Elle soulilgne un défaut (de comportement, de nature, de caractère) chez son auteur. On la dénonce, et la collectivité, impitoyable est prompte à la reprocher sitôt qu’elle lui est révélée. Qui n’a pas entendu parler du lynchage dont furent le triste objet les femmes qui avaient fauté avec l’occupant durant la guerre de 1939/1945 ? Et qui n’a pas dans le même geste condamné (par inconsicente cruauté) leurs descendants … ?

 

La famille de celui qui a fauté souffre autant que celui qui a fauté des effets et contre-coups de la faute qui lui est reprochée…. On s’empresse de la cacher… A qui la faute ? Pourquoi tant de violence ? Tant de méchanceté ? Tant de cruelles rivalités ? Pourquoi celui qui a fauté se sent-il contraint de (se) dissimuler à celui qui de son côté a tout autant fauté… mais, se dissimulant, serait ravi de le dénoncer plutôt que de partager son désarroi à l’humaine fragilité tout en l’encourageant à s’en libérer.

 

La faute confirme notre attache au monde tout en l’interrogeant, puisqu’elle suppose un éventuel rappel « à l’ordre » . Et la crainte, (ou le désir) d’être découvert qu’elle sous entend, nous aliéne.

 

Les peurs sont le fait de l’enfant mal mené qui n’arrive à grandir malgré un corps d’adulte. L’alcool est un bon expédient pour les dissimuler.

 

Enfant il nous est arrivé à tous de nous sentir pris en faute. Un « s » oublié à la seconde personne du singulier de l’indicatif, un cahier de travaux pratiques laissé à la maison ou quelques minutes de retard suffisaient à déchainer les réprimandes parentales. Ayant dérogé on ne savait à quelle loi on comprenait mal en quoi la portée de notre geste était si redoutable. Dans la crainte des contre-coups, nous nous empressions de dissimuler l’effet d’une maladresse, de la gommer, de la soustraire aux regards… commettant ainsi une faute, en enfermant l’erreur dans le secret, tandis que nous nous férions dans le silence… pour (dé)tromper nos parents. 

 

Autant l’indifférence parentale face à nos difficultés scolaires (auxquelles elle s’ajoutait), nous plongeait dans le désarroi (à l’origine qui sait de nos erreurs), autant leurs réprimandes ajoutées à leur indifférence nous achevaient…

 

Les bêtises étant un des meilleurs antidotes à la dépression… c’est peut-être mu par un réflexe de survie inconscient que l’enfant face à la difficulté, plutôt que de perdre le moral, produit des erreurs afin de bousculer l’indifférence….

 

La faute nous relie à l’autre par ignorance, erreur de jugement, crainte d’être peiné en retour, pour avoir… fait de la peine à qui l’on aime et dont on dépend, en ne lui témoignant pas le respect (inconditionnel) qu’on est tenu de lui vouer ! Education oblige. Quoi de plus cruel que d’être accusé de manque de respect de ses parents, lorsqu’à peine éveillé à la vie, on confond affection, estime, considération, tendresse..  dans un heureux melting pot que l’on appelle amour mais qui nous déconcerte quand soudain, en dépit de nos efforts, il réveille la haine ou la peur.  De l’autre. Ou la nôtre.

 

La faute en soi deviendrait une charge lorsqu’elle engendrerait la crainte, par celui qui l’a commise, d’être découvert et de perdre cet amour sans lequel il nous semble n’être rien.  Reconnu comme un « manquement » à ne pas perpétuer, une erreur de parcours à méditer, elle ne formerait pas obstacle à l’avenir. Mais ignorée, par peur ou par contrainte, deviendrait obstacle et se ferait alors (nœud) irrémédiable aussi longtemps qu’elle ne serait pas mise à découvert. Et dénouée. Faille dans un système qu’elle menace de dysfonctionnement, la nier pour ce qu’elle est en feignant de pouvoir l’insérer dans un parcours de « normalité » elle se rappelle à nous là où nous ne l’attendions pas.

 

Admettre ses fautes, comme des erreurs, aussi graves soient-elles, repérables mais réparables, plutôt que de les cacher par honte sous la honte… évite d’avoir à les porter telle une charge démesurée qui serait à la fois le fruit et l’objet de la honte, sous le poids desquels il est difficile de ne pas plier (consciemment ou non).

 

Dégager le secret, découvrir la faute, ouvre sur la perspective d’un travail de réparation et de restauration dont on ne peut faire l’économie, une fois une faute accomplie, aussi longtemps que l’on souhaite maintenir un équilibre au cœur d’une communauté. Et aide à nous délivrer d’intimes et nocifs modes d’attachement…

 

Toute vérité serait relative à un contexte supposé. Comment la reconnaître alors ? J’ai envie de dire « parce qu’elle résonne juste en vous. Comme un air de musique” .

 

La vérité atteinte n'étant elle-même qu'un moment historique, l'avenir lira les erreurs que le présent ignore, afin que le progrès de la connaissance puisse se déployer sans jamais s'achever.

 

Virginie Megglé

Juillet 2004



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16/12/2004
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